Avis Lecture : Les contes interdits – Le vilain petit canard (Christian Boivin)

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Informations :

  • Édition : ADA Éditions
  • Parution : 12 octobre 2018
  • Nombre de pages : 182 pages
  • ISBN : 9782897869021
  • Prix : 10,00€ (Broché)

Résumé :

Depuis son jeune âge, Hans Christian Andersen se savait différent des autres. Il a écrit Le Vilain Petit Canard comme une métaphore de sa propre vie. Dans cette nouvelle version sanglante, le personnage principal nous relate une existence beaucoup plus funeste…

Un informaticien orphelin aspirant à une vie plus palpitante, qui ne trouve le réconfort que dans les jeux vidéo.

Une intrigante voisine aux mystérieuses sorties nocturnes.

Une bande de marginaux dirigée par un personnage controversé se faisant appeler Démon.

Un nightclub clandestin recelant un passage vers l’antichambre de l’enfer.

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« Je déteste les histoires qui débutent par une citation, ça fait prétentieux. On dirait un complexe d’infériorité mal géré. »
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Contexte

Enfin j’ai succombé à la tentation ! Enfin j’ai lu un livre des fameux « Contes interdits » publié dans la maison d’éditions québécoise ADA. Difficile de passer à côté de cette série de contes revisités tant elle a fait parler d’elle pour devenir un véritable phénomène littéraire (en plus des ennuis judiciaire qu’a connu la maison d’éditions il y a quelques semaines). Il était donc temps que, moi aussi, je me plonge dans cette aventure.

Suite à un soudage proposé sur la page Facebook du Blog et sur différents groupes, ce fut le Vilain petit canard qui a récolté le plus de suffrages. Évasion Imaginaire s’est donc attelé à la tâche dès que le moment s’est présenté.

« Du moins, c’est ainsi que je me rappelle cette période de ma vie. J’avais l’impression que ma misérable existence n’était qu’un ouvrage en deux dimensions. Je pressentais qu’un univers entier m’échappait et que ses secrets m’étaient inaccessibles. »

Mes Impressions, attention à ce qui se dit sur la toile

Alors, très compliqué de ne pas un minimum spoiler l’histoire car celle-ci est très courte. En deux dizaines de pages, on apprend la vie et les habitudes d’un marginal nommé Clay (Clément). Directement, nous comprenons le titre du livre, Clay étant un véritable vilain petit canard, une personne qui n’arrive pas à trouver sa place dans la société et préfère vivre en marge plutôt que d’essayer à s’intégrer. Il est une parfaite représentation de cette expression. C’est un blasé de son boulot et de sa vie (un peu à l’image de « L’homme de Grand Soleil« , à croire que les québécois ne sont pas heureux de leur quotidien…). Ce dernier aime les soirées jeux vidéos et a une attirance toute particulière pour sa voisine, une belle rousse du nom d’Isabella. Cette dernière semble apprécier sortir le soir pour ne revenir qu’aux petites heures du matin. Il rencontre un homme au magnétisme impressionnant, répondant au doux nom de Damon (Démon), sur le balcon de cette fille et ce dernier l’invite dans une soirée privée. N’ayant rien d’autre à faire, il accepte, s’y rend et découvre un monde à des années lumières de ce qu’il a connu jusqu’alors.

À partir de là, on entre dans une nouvelle dimension. Pas celle d’Houdini, mais bien celle des vampires. Alors clairement, si l’on ne m’avait pas un peu spolié avant la lecture, je ne me serais pas du tout attendu à une histoire avec nos amis aux longues canines. Et pourtant, l’idée est finalement bien amenée et le sujet relativement bien exploité par l’auteur. Je parle de spoil mais au final, le suspens ne dure pas longtemps et vous entrerez vite dans le monde violent et bestial des vampires à Montréal.

Bestial, c’est le mot, car le vampire chasse comme un prédateur qui n’a pas d’autres buts dans la vie que de se nourrir. Vous l’apprendrez (à vos dépens ?) tout au long du récit. C’est violent et le sang coule à renfort de grands seaux. Après, je tique un peu. Certes il y a des scènes de violence, certes il y a un passage de show privé pour les vampires où c’est vraiment glauque et dégueu. Mais hormis deux, voir trois, passages assez trashs, je m’attendais à beaucoup plus vu les commentaires qui emplissent sans arrêt la toile comme quoi il y a des horreurs et de la violence à chaque page. Ici ce n’est pas le cas, ou alors je suis devenu un véritable sadique et je ne sais plus faire le distinguo entre scène normale et scène violente, mais j’en doute. Il y avait également des scènes plutôt explicites…vraiment explicites en fait… mais lorsque l’on entend certains jeunes parler entre eux aux jours d’aujourd’hui, ce qu’il y a d’écrit passerait presque pour une broutille. Ces scènes vous choqueront, ou pas, en fonction de votre sensibilité (et à votre capacité de ne pas tourner de l’oeil à la vue d’une goutte de sang).

Petite anecdote, le chef des vampires, Démon (misère, ce prénom…), m’a fait penser à Dracula interprété par Dominic Purcell dans le film Blade 3 (Trinity), surtout par rapport à la stature et au charisme qu’il semble dégager dans l’histoire (mais avouons que ce film était totalement mauvais par rapport aux 2 premiers, mais je m’égare…).

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Il y a vraiment du bon, et parfois du moins bon dans ce texte court. Difficile de vraiment développer quelque chose d’assez profond en 180 pages. Mais il y a un bon balancement entre action et moments d’explications. On ne s’ennuie pas et le dernier tiers, on se surprend à vouloir terminer à tout prix le livre pour voir la finalité de tout ceci, surtout lorsque l’on apprend certains éléments du passé de Clay. On pourrait dire que tout s’enchaîne très vite sur la fin et que c’est parfois bien tiré par les cheveux, mais au final, on se retrouve avec une fin satisfaisante et on regrette presque de ne pas avoir un petit mot pour nous expliquer ce qui se passe une fois l’histoire principale terminée. Du moins bon comme je disais, surtout dans la cohérence de certains moments, comme par exemple la voisine qui une fois se confie sur son passé à nous arracher une larme, puis l’instant d’après se la joue distante et autoritaire, et cela à quelques reprises. Quelques incohérences de comportement ou de réflexions et quelques facilités que l’on peut souligner. Il y a souvent des répétitions comme « Ce précieux nectar » ou « son fluide vital », oui une fois, deux fois, ça passe, pas quatre ou cinq fois. Quelques fausses notes à prévoir donc.

Je développerai ici plus bas les points qui m’ont marqués dans ce texte mais au final, ai-je aimé lire ce premier « Conte interdit » ? Je dirai oui. Certes je n’ai pas été ultra emballé et l’ensemble peut donner une impression de « vite fait bien fait », mais on se surprend à vouloir continuer, à en redemander et à finalement apprécier le texte malgré ses petites fausses notes. On ne détient pas une histoire de vampire ultra originale, mais elle a le mérite de nous proposer un vrai prédateur nocturne qui ne lésine pas sur la cruauté et le sadisme, même si on pouvait s’attendre à plus encore vu les commentaires qui entourent la série. Quelques scènes vraiment réussies et d’autres où on se demande si on n’est pas tombé dans une caricature Bit-lit.

« Je venais de comprendre que le sang de chaque humain possédait un goût différent, et je désirais découvrir toutes les saveurs possibles. Je percevais dorénavant le monde comme un immense buffet gratuit qui n’attendait que mes canines acérées. »

Ce que j’ai aimé

  • L’objet livre est plus que sympa, avec une couverture attirante et la quatrième de couverture est stylée. Un beau travail des éditions sur l’ensemble des œuvres des « Contes interdits ». Cette couverture est signée Mathieu C. Dandurand.
  • Un livre réinterprétant les contes de notre enfance, mais de façon très obscure et souvent trashs. Que l’on soit pour ou contre, il faut avouer que c’est un pari osé, et l’audace fait du bien.
  • L’auteur jongle habillement entre les scènes d’actions, les descriptions de décors et d’ambiance, à défaut d’avoir une écriture exceptionnelle. En 182 pages, l’auteur arrive à nous embarquer dans ce qu’il veut nous proposer même si on pourrait reprocher une fin qui part un peu dans tous les sens, mais elle a le mérite d’être surprenante.
  • L’histoire est fluide et le livre se lit facilement et rapidement. Quelques scènes cocasses viennent apporter un peu d’humour et de couleurs à ce tableau sombre.
  • Enfin un vampire méchant, sadique, vilain, très vilain. On ne lésine par sur les passages sanglants. Les deux scènes où l’on se retrouve dans le nightclub sont particulièrement réussies. La découverte par Clay et le show privé pour les vampires sont deux moments culminants dans l’horreur du livre.
  • Clay est peut-être une sorte de cliché sociétal, mais il est bien réussi et bien travaillé. On ressent avec lui ses doutes, ses interrogations, son plaisir,… le texte écrit à la première personne aide beaucoup dans cette immersion.

Ce que j’aurai aimé, ce qui m’a dérangé

  • Quelques moments d’incompréhension ou d’incohérence, notamment avec Isabella, ou bien tout le mystère que l’on fait autour de la nouvelle condition de Clay (que l’on comprend à la fin cela dit, mais qui est frustrant tout du long de la lecture). À un moment il y a des chasseurs de vampire, pourquoi on n’en parle pas avant ? Pourquoi on ne prévient pas Clay ? Comme-ci cette partie était une pièce rajoutée pour donner de la concistance au récit.
  • Quelques répétitions comme « ce précieux nectar » ou « fluide vital ». Bon, difficile de trouver d’autres termes pour parler du sang mais bon, ces termes revenaient quatre, cinq fois et sur 180 pages, ils étaient assez nombreux pour être remarqués.
  • Vu le tapage des « Contes interdits », je m’attendais à beaucoup plus de trash. Alors oui, il y a deux ou trois scènes hardcores mais honnêtement, je m’attendais à ce que cela aille encore beaucoup plus loin. Ce livre n’est pas conseillé à tout le monde, clairement, mais ceux qui s’attendent à du sanguinaire à chaque coin de page seront peut-être déçus. Je ne suis pas pour le sang et la violence gratuite, loin de là, mais c’est surtout par rapport aux échos que j’ai lus et entendus à tout bout de champ que je dis cela.
  • On aurait peut-être souhaité un développement plus en profondeur en règle général. Bon, c’est un choix de l’édition que de proposer ce genre de roman court et l’écriture de l’auteur nous propose d’aller à l’essentiel. On aurait souhaité aller peut-être un peu plus loin dans l’Histoire des vampires ou voulu savoir ce qu’il advenait de Clay suite à tout ce qui s’était passé.

Point neutre, réflexion

  • Le québécois. J’ai lu à plusieurs reprises que certaines personnes avaient du mal avec certaines expressions locales et que cela pouvait les sortir de leur lecture. Dans ce livre oui, il y en a aussi et je trouve sympa le fait de lire dans leur contexte ces expressions d’une même langue et pourtant si différente. Dans le vilain petit canard, les expressions ou mots peuvent peut-être un peu déstabiliser mais honnêtement y a rien de méchant.

Conclusion

Un premier livre issu des controversés « Contes interdits » de la maison d’éditions québécoise ADA et une première expérience plutôt réussie même si j’ai eu du mal à réellement dire si j’avais été déçu ou non par l’ensemble. L’on côtoie des vampires sadiques et des lieux lugubres, l’on assiste à des scènes trashs et à des meurtres avec effusions de sang à gogo. Loin d’être accessible à toutes les âmes, les plus sensibles n’y arrivant pas après 30 pages, je m’attendais cependant à encore plus de noirceur et de sadisme compte tenu des échos que j’ai lu à propos des fameux « Contes interdits ». L’impression qu’on aurait pu aller encore plus loin reste en tête à la fin du récit qui manque d’un petit épilogue pour conclure le tout. Le vilain petit canard, superbement interprété par le pauvre Clay, est une réinterprétation sombre mais finalement assez sympathique de l’oeuvre de 1842. Le petit format du livre ne permet pas beaucoup de digressions ou d’explications en profondeur et l’auteur va à l’essentiel, jonglant habillement entre les scènes actions, les descriptions et les sentiments avec souplesse, mais souffrant parfois de répétitions ou d’illogismes qui peuvent parfois nous ennuyer dans une lecture somme toute fluide et agréable. Mon premier « Conte interdit » et pas le dernier.

Note

7/10

Si vous avez apprécié cette critique (ou pas), n’hésitez pas à commenter. Si vous l’avez déjà lu ou si vous avez des questions spécifiques au récit, laissez une trace de votre passage 🙂

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14 réflexions au sujet de « Avis Lecture : Les contes interdits – Le vilain petit canard (Christian Boivin) »

  1. Très bonne chronique mais étrangement ça ne me fait pas envie. Je me dis que si toi tu n’as pas eu ton compte question trash alors je vais sûrement être déçue et agacée vu mon niveau d’attente quand ça touche aux vampires xD ou au gore dans ce contexte. Peut être pas le conte interdit avec lequel commencer. J’attends toujours une ouverture pour Hansel et Gretel.

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    1. Merci Manon 🙂
      Bah disons que c’est au goût de chacun. Quant toi tu a failli vomir ton petit déj avec Geoffrey sur Kidnapping, moi j’avais bon, j’étais au taquet (même si j’étais un peu inquiet d’être dans un bled pommé à ce moment-là lol). Je crois que tu pourrais y trouver ton compte et que tu devrais peut-être lui laisser sa chance (mais je peux me tromper). Après, y a-t-il vraiment un livre pour vraiment démarrer les contes interdits ? Je ne sais pas. Pour Hansel et Gretel, on devra attendre la fin du procès (et un probable non lieu) pour pouvoir se l’acheter.

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      1. C’est vrai ! Faudra que je me lance un jour, j’aurai aimé les lire en numérique mais tu dois les acheter en dollar c’est prise de tête :’) si un jour j’en croise un, j’ y verrai un signe pour me lancer !
        Et oui probablement pour Hansel et Gretel 😦 même si j’ai une pote qui l’a trouvé dans un club en Belgique ya quelques jours seulement !

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    1. L’un des livres (Hansel et Gretel pour ne pas le citer) possède du contenu pédophile, mais il s’agit d’une seule scène et il ne s’agit pas du thème principale de l’oeuvre donc je pense qu’il y aura un non-lieu, d’autant plus qu’il s’agit ici de fiction. Mais à voir comment tout cela va finir.

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