Avis Lecture : Le Vieil Homme et la Guerre, tome 1 (John Scalzi)

  • Édition : Différentes éditions
  • Parution : 2007
  • Nombre de pages : + – 380 pages
  • Traducteur/trice : Bernadette Emerich
  • ISBN : Différentes collections
  • Prix : Différents selon les éditions
  • Récompense(s): Prix Campbell du meilleur nouvel auteur

Résumé :

“J’ai fait deux choses le jour de mon soixante-quinzième anniversaire. Je suis allé sur la tombe de ma femme et je me suis engagé.”
À soixante-quinze ans, l’âge minimum requis, John Perry n’est pas le seul à intégrer les Forces de défense coloniale, le seul ticket pour les étoiles, mais sans retour. Plus rien ne le retient sur Terre. Combien d’années de vie peut-il encore espérer ?
En revanche, s’engager, c’est défendre la Terre, protéger l’expansion de l’humanité dans les étoiles, retrouver une seconde jeunesse et, à l’issue du service, obtenir le statut de colon sur une planète nouvelle. Sur Terre, nul ne sait ce qu’il advient de ces recrues à part qu’on leur promet une guerre sans merci contre la myriade d’espèces intelligentes qui se partagent un “espace vital” interstellaire beaucoup trop étroit. John Perry devient donc soldat. Avec son nouveau statut commencent les révélations, inimaginables.

Mon avis

Mon premier Sclazi et sans doute pas mon dernier. Cela faisait un temps que j’entendais parler de la qualité en SF chez Scalzi et lorsque j’ai vu que plusieurs de ses nouvelles avaient été reprises pour l’anthologie « Love, Death & Robots » (dont les épisodes sont particulièrement intelligents et drôles), je ne pouvais que me lancer, confiant dans le plaisir que j’y retirerai. Et en effet, le plaisir fut au rendez-vous.

« Vous aurez quatre-vingt-cinq ans et, alors, la seule différence entre vous et un raisin sec sera que, si vous vous retrouvez tous les deux ridés et sans prostate, le raisin, lui, n’en a jamais eu.« 

John Perry n’a plus rien qui le retient sur une Terre où la surpopulation et le vieillissement général sont des problèmes qui ont enfin trouvé une porte de sortie : s’engager dans les forces de défenses coloniales. Alors, vous me direz, qu’est-ce que cette « FDC » fait avec tous les vieux de la Terre ? Ne pas vous le révéler limiterait considérablement mon article mais je tiens tout de même à vous prévenir et que c’est un spoil (même si la réponse est dans le synopsis) : les FDC vous promettent de rajeunir quiconque souhaite entrer dans les forces coloniales et de les former pour qu’ils deviennent la première force de défense de l’humanité dans l’espace. Si vous souhaitez vous engager, vous devrez servir minimum 2 ans (renouvelable pour 10) et ainsi gagner le droit par la suite à vivre sur l’une des colonies conquises par l’Union. Rajeunir ? Redécouvrir les sensations d’un corps fort et en pleine santé ? Devenir une machine de guerre surentraînée capable de prouesses physiques impossibles ? Faire la guerre à des aliens aussi nombreux que variés ? Découvrir l’espace infini et ses millions de possibilités ? Signez-moi tout de suite ! Sauf que, ce qu’on ne dit pas forcément lors de l’inscription, c’est que l’on peut mourir. Bah oui ! La guerre comporte des risques. Sauf que dans l’espace, face à des formes de vies qui n’ont rien à voir avec l’espèce humaine, l’on peut mourir dans des conditions, disons, assez cauchemardesques. Et beaucoup d’humains meurent lors de ces 2 années de service. Même une fois installés sur une colonie, rien ne vous garantit que vous ne serez pas tué par une espèce qui aura décidé de recoloniser la planète sur laquelle vous êtes. Bref, une nouvelle vie pleine de dangers s’offre à vous soldat, et vous avez signé pour ça !

Le début était peut-être un peu long, avec la mise en place du personnage de John Perry, de sa vie d’avant et de ses motivations à s’engager. Mais c’est nécessaire si l’on veut cerner le personnage qui traversera d’ailleurs plusieurs phases au cours du roman, d’abord las de la vie pour finir déterminé et prêt à transgresser les règles pour découvrir la vérité. J’ai particulièrement apprécié l’autodérision tout au long du texte et des explications (elle rend ces dernières particulièrement plus digestes et légères), ce qui sera un marqueur fort dans les œuvres de l’auteur. Un peu d’humour noir par-ci, un peu de rhétorique fataliste tellement vraie qu’on en peut que sourire, un zeste de moments cocasses… Bref, ces éléments humoristiques sont les bienvenus dans un livre qui traite principalement de la guerre.

« Nous nous renvoyâmes la balle pendant une demi-heure et nous aurions continué si elle ne s’était pas cassée à force d’être frappée à une vitesse aussi vertigineuse. C’était ridicule. C’était merveilleux. »

Vous me direz que c’est du vu et du re revu, mais finalement, Sclazi apporte ses touches personnelles qui font que cette œuvre est légèrement décallée et l’histoire en elle-même n’est pas si banale qu’elle en a l’air. Déjà, l’implication du troisième (voire quatrième) âge dans une guerre (spatiale qui plus est) et leur redonner une « utilité » si l’on peut dire les choses ainsi, le processus de métamorphose, la découverte et l’adaptation à son nouveau corps (vert s’il vous plaît), la formation, les premières missions, les aléas de la guerre avec ses coûts et ses questionnements, la découverte des autres corps d’armée et une rencontre qui bouleversera finalement John Perry et qui fera accélérer le dernier tiers comme on ne s’y attendait pas, avec une bataille finale qui ferait sans doute concurrence à celle de l’épisode VI de Star Wars (Le Retour du Jedi).

J’y ai ressenti des effluves de « Étoiles, garde-à-vous ! » (Starship Troopers) de Robert Heinlein mais en plus léger et accessible (le livre d’Heinlein était très bon mais pas forcément facile à digérer). Lorsque l’on lit les monuments de la SF comme le dernier ouvrage cité, les livres comme « Le vieil homme et la guerre » n’apporte pas grand chose de nouveau au genre, mais son accessibilité et sa légèreté en font un candidat parfait pour démarrer dans le genre de la SF. En vrai, quand je vois Hollywood vouloir faire des reboots de tout et n’importe quoi ou de pondre les mêmes navets héroïques pour un public en saturation du genre, ce genre d’histoire pourrait très bien être amenée au cinéma et si la touche humoristique de l’auteur est préservée, ça pourrait être un carton au Box-Office, même si ces dernières années les critiques des spectateurs deviennent de plus en plus négatives et agressives. Mais c’est un autre débat.

Quels sont les points positifs et négatifs de ce livre finaliste du prix Hugo et a obtenu le prix Campbell du meilleur nouvel auteur ?

Les points + :

  • Le concept. Rendre les personnes âgées à nouveau utile pour la société en les envoyant au front, sérieux, fallait y penser et l’oser. Et l’auteur y arrive à merveille. Puis, un corps jeune, avec un esprit d’une sagesse de 75 ans ou plus, imaginez les effets, imaginez le soldat que cela donnerait. Scalzi l’a fait.
  • Une écriture fluide et intelligente, c’est accessible à tous. Écrire à la première personne permet au lecteur de découvrir avec le personnage principal.
  • Le ton, parfois sarcastique ou avec autodérision, distille avec intelligence de l’humour et de la légèreté dans un sujet souvent brutal et difficile qu’est la guerre.
  • Découvrir de nouvelles espèces, ne pas se fier à leur physique, découvrir la vie dans l’espace, comment fonctionne les FDC et découvrir les missions aussi variées que risquées… c’est sympa. C’est même très sympa.
  • Qui dit guerre dit… BAGUARRE ! … Ahem… Donc oui, il y a de la baston, il y a du sang, on ne cache pas notre lot de charpies sanguinolente et c’est tant mieux.
  • Bien que le personnage principal ne m’ait pas forcément interpellé ou forcément séduit sur les 2 premiers tiers, le dernier tiers avec sa découverte et sa rencontre va bouleverser aussi bien son état que celui du lecteur, ce qui va confirmer l’empathie que l’on aura généré pour lui petit à petit au fil de l’évolution du livre.
  • La fin, émouvante, se suffit à elle-même et si vous le souhaitez, vous pouvez arrêter là et ne pas lire les prochains tomes car la fin est vraiment amenée comme-ci c’était fini. Mais bon… il y a des suites… puis c’est Scalzi… puis l’espace, tout ça… bref.

Les points – :

  • Un peu long au début. Mais nécessaire.
  • Le personnage principal est très lisse, en tout cas sur une grande partie du récit, j’ai apprécié découvrir ce nouvel univers à travers ses yeux mais je n’ai accordé d’importance à sa personne que sur le dernier tiers.
  • La réflexion ci-dessus souligne un autre problème, les relations humaines. Bien qu’assez présentent à la fin du premier tiers, elles sont fortement occultées par la suite pour laisser place aux missions et à la guerre en elle-même. Hormis avec le groupe du début et leurs rescapés, il n’y a pas réellement d’interaction émotionnelle avec d’autres personnes sauf au dernier tiers.
  • Pas d’humains vraiment méchant. Et pourtant, ce n’est pas parce que tu es une personne âgée que tu es un Sain. Cela manque de salauds, d’hommes et/ou de femmes mauvais de nature. Il n’y pas réellement de rival ou de Némésis au personnage principal. C’est dommage.

Conclusion

Être finaliste du prix Hugo et obtenir le prix Campbell du meilleur nouvel auteur, cela donne déjà une idée, normalement, de la qualité de l’ouvrage. Puis il y a les avis du public qui, dans leur grande majorité, son particulièrement positifs à l’égard de ce récit. Le topic, déjà peu banal, de transformer les personnages âgées en machines de guerre pour défendre la Terre contre les populations aliens est quelque chose de particulièrement accrocheur pour les amateurs de Space Opera. Je ne suis pas forcément féru de Science-Fiction, ayant souvent peur de tomber sur des œuvres qui seraient trop grandes ou trop complexes pour moi. Ce n’est pas le cas du « Le vieil homme et la guerre » qui, malgré quelques points noirs mais sans réelles incidences sur le plaisir de lecture, réussit à nous embarquer à travers les yeux du personnage principal pour découvrir tout ce que l’univers de l’auteur a à nous offrir. Nouvelle jeunesse, croisade contre les aliens dans l’espace, des questions et éthiques et des secrets bien gardés, la découverte d’espèces de toutes sortes et de toutes formes, des batailles spatiales et terrestres, une fin à l’émotion forte, bref, tous les ingrédients sont réunis pour une bonne tranche de lecture et, plus surprenant, de sourire, car le ton employé par Scalzi nous fait souvent travailler les zygomatiques par ses phrases sarcastiques ou avec autodérision, parfois avec un humour noir remplit d’une justesse cruelle qui prête à sourire malgré elle. Bref, il n’est pas étonnant de savoir que ce livre fait aujourd’hui partie des classiques de la SF contemporaine, et à juste titre.

Note

9/10  

Si vous avez apprécié cette critique (ou pas), n’hésitez pas à commenter. Si vous l’avez déjà lu ou si vous avez des questions spécifiques au récit, laissez une trace de votre passage 🙂

D’autres avis d’experts, c’est par ici –> Dionysos, Les Lectures du Maki, Le Chien Critique, Blog-O-livre, Ombrebones, Célinedanaë, Valunivers,…

2 réflexions au sujet de « Avis Lecture : Le Vieil Homme et la Guerre, tome 1 (John Scalzi) »

  1. C’est en effet un excellent roman pour commencer la SF militaire, voire la SF tout court. Pour ma part je n’ai pas vraiment aimé Starship Trooper, le héros n’était pas attachant, les opinions de l’auteur n’étaient pas les miennes et étaient, même objectivement, très contestables et ça manquait beaucoup d’action. Le vieil homme et la guerre est moins porté sur la réflexion, mais n’a pas non plus tous ces défauts.
    Après, j’ai apprécié John Perry dès le départ, dès l’incipit assez marquant que tu as cité. Comment ne pas avoir envie de découvrir la suite après ça ? C’est vrai que l’histoire n’est pas extrêmement originale, mais cet espèce de « sagesse » dans un corps de jeune qui donne à Perry un regard un peu décalé sur les événements est très divertissant.

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