Informations :
- Édition : L’Alchimiste Éditions
- Parution : 11 janvier 2019
- Nombre de pages : 498 pages
- ISBN : 978-2-37966-023-8
- Prix : 18,50€ (Broché), 6,99€ (numérique)
Résumé :
1793. La France vit sous le règne de la Terreur. Dans la ville occupée de Lyon, un hussard affecté aux Affaires occultes enquête sur la disparition mystérieuse d’un frère d’armes. Au cours de ses investigations, il va devoir affronter des représentants de sectes étranges, des politiciens ambitieux, des bohémiens, il devra explorer des souterrains baignés de secrets anciens, il croisera une espionne italienne, une chanteuse, des chats, des corbeaux, des morts, des vivants… et des cendres.

« Au Diable leur Révolution, plutôt riche ailleurs que libre et crève-la-dalle en France, ajouta petit Paul. »
Mes impressions, c’est si dark ! On dirait une oeuvre DC Comics !
Couverture :
Coup de coeur sur la couverture (comme pour le précédent article le Roi des Fauves), mais cette fois-ci elle est l’oeuvre d’Okiko (qui a également réalisé la couverture de « la nuit de la vouivre » de JP Favard, roman couronné du prix Masterton 2018). Cette fresque représente superbement le livre dans chaque les nombreux éléments mis en valeur, « Le Faucheux », le violoniste, le hussard de la Mort chevauchant son Cauchemard, les chats, les corbeaux et autant d’autres éléments qui sont présent dans le récit. Vous trouverez l’ensemble du travail d’Okiko sur son site ICI !
Les personnages :
Il y en a beaucoup. Plusieurs issus de l’Histoire (Fouché, Collot d’Herbois, Robespierre,…) et beaucoup d’autres imaginés pour les besoins du récit (Mangetrogne, l’homme-livre appelé le Patriarche, le Faucheux, Grincerouge,…). Moi qui suis généralement fan des récits multi-voix, j’ai eu du mal à me mettre à fond dans l’histoire car chaque chapitre est une personne différente, parfois un protagoniste important, parfois de simples figurants, chacun ouvrant ou suivant un arc narratif différent. C’est assez complexe et on peut se sentir désorienté, surtout au début. Lorsque l’on commence à comprendre qui est qui et quels sont les enjeux, la lecture devient plus fluide et le jeu peut commencer. Avec autant de personnages, difficile de leur dépeindre un portrait détaillé ou une psyché vraiment fouillée, mais tout l’intérêt de l’histoire réside dans ses intrigues et les individualités se révèlent au fur et à mesure. Au final, personne ne sort vraiment du lot et chaque personnalité est intéressante à suivre et à découvrir. Un bémol cependant concernant le personnage « principal » (difficile de le désigner ainsi mais il est centre de toutes les attentions) Laurent d’Orléac le hussard de la Mort qui manque, à mon sens, de complexité, mais j’ai adoré sa monture Caracalla, un monstre créé par les alchimistes, à l’allure de cheval, doué de parole et ayant une affection toute particulière pour la viande morte… classe !
Le récit :
À l’image de ses personnages, le début est poussif, compliqué à suivre car beaucoup d’informations déboulent tout du long. De plus, si l’on ne possède pas d’affinité particulière avec l’Histoire, on peut être désorienté. À l’école, en Belgique en tout cas, la Révolution est abordée mais pas en profondeur (je me rappelle qu’on avait abordé le régime de la Terreur mais sans plus), préférant se focaliser sur les accomplissements de Napoléon Bonaparte et ce qu’il a apporté à l’Hexagone et à l’Europe. Les événements de Lyon, et de la France en général finalement, m’étaient totalement inconnus et j’avais oublié cette totale répression qu’avait subie l’Église catholique face à la vague de Raison qui s’emparait du territoire.
Bon, bien sûr, tout ceci a été un peu remanié pour coller avec le récit que voulait nous proposer l’auteur. Désorientant donc, beaucoup de personnages, beaucoup d’intrigues, on se demande longtemps vers quoi le texte essaie de nous amener. Un peu à l’image du récit, on navigue en pleine brume, c’est sombre, mais genre…vraiment…vraiment sombre, et des éléments Fantastiques viennent apporter une touche de difficulté supplémentaire.
Lyon est une ville presque détruite par les bombardements. Les royalistes ont été boutés hors de la ville et les prisonniers sont massacrés par centaines, tantôt à la guillotine (régime de la Terreur), tantôt au canon (Fouché le « Mitrailleur de Lyon »). C’est dans une France instable et un Lyon en plein chaos que le hussard de la Mort (agents libres sensés garder un œil sur tout ce qui est attrait à l’occulte) nommé Laurent d’Orléac va tenter de retrouver un ami et collègue nommé « Le Grignet » qui avait découvert de la contrebande d’objets magiques dans les bas-fonds de la ville. D’autres enjeux se jouent en parallèle de cette mission et les conflits, qu’ils soient visibles ou non, sont légions. Nous assistons donc à des guerres sur différents niveaux : les Citoyens républicains et les Royalistes, entre les soldats de différents régiments ou de grade et contre les gitans, le Temple de la Raison et les catholiques, ce même temple contre les alchimistes, le « prince des chats » contre les corbeaux, Mangetrogne l’imprimeur contre le Faucheux,… et j’en passe et des ficelles qu’il faut tenter de dénouer pour y voir clair. La recherche de partitions qui donneraient accès à la « symphomancie » (musique divine qui réveillerait les morts), le groupe des Convulsionnaires (utilisant des vierges pour recevoir les réponses de Dieu) faisant alliance avec les royalistes pour reprendre Lyon, le Faucheux qui défend « La Sombre » et peut voyager à travers les « Limbes », les hommes de pouvoirs qui veulent éliminer les alchimistes sortis de l’ombre pour aider la Révolution et la République qui, eux-mêmes, veulent mettre fin aux hussards de la Mort, leur propre création devenue trop libre et victime de leur légende,… Bref, c’est complexe et il faut rester accroché tout du long. D’autant que certains éléments ésotériques n’ont pas encore révélé leur nature et les enjeux des différents partis sont pour certains encore assez flous.
Explicité comme cela, l’on pourrait croire que j’ai passé une mauvaise lecture. Je vais vous avouer que c’était pas simple. Il fallait s’accrocher et de temps en temps faire un saut sur internet pour comprendre de quoi on parlait (quand on parle de Convention, de Commission des sept, du Comité de salut public, des sans-culottes et j’en passe, un peu d’aide n’est pas de refus). Au final, si on s’accroche, on passe un bon moment de lecture, on se surprend à aborder chaque nouveau chapitre avec moult interrogations, on souhaite en savoir plus sur ce qui se trame et les enjeux qui vont amener les personnages à se rencontrer à un moment donné. Tout semble converger vers le pauvre hussard Laurent d’Orléac, qui devra affronter son passé et bien des obstacles pour trouver le fin mot de l’histoire. Difficulté supplémentaire, sa mère et sa soeur ont rejoint les rangs des royalistes. La confrontation semble inévitable. On se laisse finalement prendre aux jeux d’influences, d’enquêtes et d’occultismes qui laissent présager une suite mouvementée et on ne peut plus indécise. Il s’agit cependant d’un premier tome et comme tout premier tome, on pose les bases de ce qui va arriver ensuite.
La plume de l’auteur, bien qu’elle ne soit pas exempt de tout reproche sur la syntaxe ou la longueur des descriptions, est vraiment belle, soutenue sans l’être de trop, et nous propose un voyage très sombre jalonné de morts. Les quelques scènes d’actions, teintées d’Horreur, sont vraiment agréables à lire. On regrettera qu’il n’y en n’ai pas plus. Louons également le travail de recherche historique qui n’a pas dû être une mince affaire ainsi qu’une prise de risque importante dans le choix des différentes intrigues.
Reprenons ensemble les différents points positifs et négatifs.
« La fosse commune était certainement le point culminant de cette infamie. Et lorsqu’il soufflait un peu plus fort qu’à l’accoutumée, le vent apportant dans la mort une juste vengeance aux anonymes au travers d’un souffle putride. »
Ce que j’ai aimé
- La couverture, sans aucun doute ! Élément principal de mon choix dans la Masse critique Babelio, je la trouvais magnifique et après lecture, elle colle totalement avec l’esprit de l’histoire qu’elle propose. Bravo à Okiko pour cette fresque !
- Une plongée en apnée dans l’un des segments les plus chaotiques de l’Histoire de France, la Révolution et le régime de la Terreur. Même si le texte s’inscrit dans un contexte très Fantastique, nombre de détails et de descriptions nous permettent d’avoir un aperçu du quotidien des habitants, éternels victimes des conflits de pouvoir, des répressions, des différents pouvoirs de l’époque,… Le travail historique déployé par l’auteur est à mettre en évidence.
- L’orientation occulte et ésotérique apportée par les alchimistes et autres personnalités obscures (Bruno Berthemioz, le Patriarche, le Faucheux,…) est un vrai plus dans un contexte déjà chaotique. Les hussards de la Mort sont les dignes représentants de ce choix narratif même si on aurait souhaité qu’il y ait plus (surement dans les prochains tomes). Les monstres tels que les Cauchemars comme Caracalla, le ver luisant géant ou encore les morts-vivants sont de vrais réussite et font basculer le texte, le temps de quelques paragraphes, dans l’Horreur et on apprécie.
- L’écriture de l’auteur, bien que souffrant de quelques défauts, est très agréable à lire et bien que certains termes ne soient pas évidents, l’utilisation d’un langage légèrement soutenu n’est pas pour déplaire, loin de là.
- Avec de la persévérance, on arrive à apprécier les nombreux arcs narratifs proposés dans l’histoire. Bien sûr, chacun aura son arc préféré en fonction de vos affinités avec les intrigues et les personnages qui vont avec. Mais dans l’ensemble, il s’agit d’une fresque complexe et ambitieuse.
Ce que j’aurai aimé, ce qui m’a dérangé
- Ce qui fait la force du récit peut également être sa plus grande faiblesse. Je parlais de s’accrocher. En effet, les arcs narratifs et intrigues se multiplient à tel point qu’on pourrait vite être perdu si on ne reste pas concentré tout du long. Mes quelques notes m’ont aidé à y voir plus clair mais lorsque je ne lisais pas pendant plusieurs jours, la reprise était ardue. Rien d’insurmontable, qu’on se le dise, mais il faut passer le cap du début poussif et de la mise en place du contexte.
- Je parlais de force du récit, notamment au niveau de l’écriture. Celle-ci souffre de quelques oublis de mots, de ponctuation à revoir pour le rythme des phrases, et de descriptions parfois trop longues. Les deux derniers points peuvent être sujets à débat car chacun aura sa vision des choses, tandis que les oublis de mots ne sont pas vraiment gênants, mais ça fait toujours un peu tâche sur une oeuvre aussi ambitieuse.
- Pour les profanes de l’Histoire, il aurait été intéressant de mettre en annexe ou autre quelques explications concernant les différents niveaux de pouvoir en place lors de la Révolution comme la Convention, la Commission des sept, le Comité de salut public, le Temple de la Raison, les sans-culottes,… Je ne doute pas que les français de l’Hexagone auront des notions de bases plus solides que les lecteurs d’autres pays, mais bon, cela aurait été un plus.
- Manque de complexité du personnage principal à mon goût, ce qui contraste avec l’aspect général du texte. Sa monture issue de l’Enfer semble avoir plus de caractère que lui.
Conclusion
Telle la couverture du livre, l’auteur nous dépeint une fresque ambitieuse prenant pied dans un Lyon en…cendres suite aux bombardements qu’a subit la ville. Un texte joliment écrit malgré quelques petites imprécisions, l’Histoire revisitée à la sauce Fantastique qui n’est pas pour déplaire au lecteur, un hussard de la Mort chevauchant son Cauchemar en direction de son destin, des ingrédients qui donnent envie d’aller plus loin. Et si le changement de personnage à chaque chapitre et la multiplication des arcs narratifs ne vous effraient pas, tentez l’expérience, concentrez-vous et visitez Lyon comme jamais auparavant. Entre la Raison et l’ésotérisme, entre les Limbes et la foi envers Dieu, la recherche de partitions issues de la symphomancie, des vierges comme moyen de communiquer avec le divin, non clairement, votre voyage ne sera pas de tout repos. Armez-vous de patience et laissez-vous porter par les notes, l’écoulement de la Sombre, et découvrez Lyon sous un manteau de cendres.
Note
8/10
Si vous avez apprécié cette critique (ou pas), n’hésitez pas à commenter. Si vous l’avez déjà lu ou si vous avez des questions spécifiques au récit, laissez une trace de votre passage 🙂
D’autres avis d’experts, c’est par ici –> Les livres enchantés ,…
Voilà un livre que tu me donnes envie de découvrir 🙂 par contre pour ta mésaventure personnellement je ne suis pas si choquée que ça. Ce qui me dérange un peu, c’est ta réflexion (sans offense hein ici, je te donne juste mon ressenti :)) Le concept de la masse critique c’est de recevoir un livre, il n’a nulle part été précisé que le livre doit forcément être en papier
ou alors je suis passée à côté et si c’est le cas je m’en excuse. Après je comprends ta déception hein, mais je trouve que recevoir gratuitement un roman est déjà un beau cadeau en soi, qu’importe son format 🙂 et qu’il faut se réjouir de cette chance car pour les éditeurs, les services presses sont de lourds investissements. Bref voilà je voulais juste réagir la dessus, merci pour la découverte 😊
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Pas de soucis je comprends ton point de vue. Mais il me semble que lors d’une Masse critique, si le livre proposé en Ebook, il est mentionné comme pour les audio. Après j’ai eu le fin mot de l’histoire et j’ai retiré ce passage de l’article. De toute façon , il n’avait pas grand chose à avoir là vu que je critiquais le livre et non la façon dont je l’ai reçu.
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Je n’ai jamais eu le cas donc je l’ignore mais ça ne change pas l’idée de base. D’autant que si ça te posait vraiment un souci moral (ce que tu considérais comme un non respect des clauses de la masse critique) alors tu aurais dû tout simplement refuser le roman et il aurait été attribué à une autre personne. Je comprends ta vision des choses mais à partir du moment où tu as accepté de recevoir le livre dans ces conditions, il n’est pas juste de blâmer la maison d’édition. On a trop tendance à oublier que les services presses sont des privilèges, pas des dus. Du coup c’est bien que tu aies retiré ce passage de ta chronique et que tu aies pu discuter avec les responsables de la maison d’édition 🙂 Tout est bien qui fini bien !
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Bah étant sélectionné il était normal que je reçoive le roman. J’étais surtout frustré de ne pas recevoir le format prévu mais au final, c’était pas plus mal ainsi quand j’y repense. Donc beaucoup de blabla pour rien et de l’expérience qui rentre, ça peut pas me faire de tort.
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pas lu non, mais je ne crois pas que ce soit mon registre.
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Mmh, la complexité du worldbuilding pourrait s’avérer être un challenge intéressant pour toi, même si en effet je ne crois pas qu’il entre dans ton registre habituel.
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Merci pour le lien ^^ je ne m’attendais pas à ce que ce livre figure dans tes découvertes ^^ Très bonne idée en tout cas ce rendez-vous 😉
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