Avis Lecture : L’Étoile du matin (David Gemmell)

Informations :

  • Édition : Bragelonne
  • Parution : 17/01/2018 
  • Nombre de pages : 440 pages
  • ISBN : 9791028104900

Résumé :

Les hordes angostines déferlent sur les frontières méridionales des Hautes-Terres : l’invasion a commencé. Sur leur passage, les Angostins sèment terreur et destruction, soutenus dans leur conquête par la sorcellerie d’un nécromancien fou. Inconscient de ses actes, il décide de ramener à la vie les Rois Vampyres, morts depuis des siècles. Seul Jarek Mace, le bandit de grand chemin, aura le courage de se mettre en travers de la route des Angostins et des morts-vivants. Très vite, il deviendra le héros dont les Hautes-Terres ont besoin, et ralliera son peuple sous sa bannière.Tous voient en lui L’Étoile du Matin, figure légendaire, revenue également d’entre les morts pour sauver une fois encore les Hautes-Terres. Seule une personne connaît la vérité, Owen Odell le barde, l’ami de Mace. Des années après ces événements, Odell se souvient et nous raconte l’histoire de ce fameux bandit, du sauveur dont on chante encore les exploits, le coupe-jarret qui aurait égorgé père et mère pour le prix d’un repas.

Auteur, 

Pour connaître la biographie de la figure de proue de l’Heroic Fantasy contemporaine, c’est par ici –> David Gemmell

David Gemmell

L’objet livre, 30 ans de légende ❤

La nouvelle version Bragelonne fut éditée pour l’événement « 30 ans de légende » en l’honneur du regretté David Gemmell. Cette édition spéciale, bien que de moins bonne qualité que l’édition Stars de chez le même éditeur, est malgré tout très belle, la couverture est sympa et le reste poursuit la même idée graphique et sobre que les autres livres de Gemmell publiées à l’époque dans la version Milady (aujourd’hui revenu sous le nom de Bragelonne).

Malgré tout, l’on ne pourra que regretter que cette version se salisse et s’abîme aussi vite. Le papier comme la couverture sont très fins, il ne faut donc pas manipuler ceci avec trop d’hardeur.

« En quoi la vérité pourrait-elle t’intéresser ? À quoi te servirait-elle conteur ? Tes auditeurs se moquent de la vérité. Ils n’en veulent pas et n’en ont jamais voulu. Ils veulent des héros, mon garçon. Des hommes extraordinaires, beaux et grands, des hommes d’honneur : les légendaires Highlanders. La vérité, ils la balaieraient de la table et l’écraseraient d’un coup de talon, comme un vulgaire cafard. Tu sais, la vérité n’est pas belle à voir. »

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Mes impressions, même différent, le Cycle Drenaï n’est jamais bien loin

Une histoire très différente de ce que j’ai déjà pu lire de cet auteur (Légende et Waylander). L’on connaît l’aspect héroïque qui compose chaque livre du cycle Drenaï, le panache et la bravoure de ses héros, les fameuses batailles impossibles à gagner et qui pourtant finissent toujours bien même si tout le monde est mort,… Il y a un peu de tout ça, mais pas que.

Dans ce one-shot, une histoire complètement différente du Cycle Drenaï (vous êtes sûr ? J’ai cru lire Ventria quelque part 😉 ). Le héros ? À des années lumières des Druss ou des Waylander. Une escalade d’action ? Pas tant que ça.

Owen Odell, barde de profession, utilise la magiq pour amuser la galerie et gagner sa vie. Sa vie justement va basculer le jour où il rencontrera Jarek Mace. Séduisant jeune homme qui possède tous les vices du monde. S’ensuit une longue histoire sur la relation et les aventures que vont vivre les deux personnages. Ils devront affronter le maître d’Owen, Cataplas, subir le retour des Rois vampyrs et affronter l’armée agostine déchaînée.

Comme chaque histoire de Gemmell, c’est efficace. On a vraiment l’impression que cet auteur pourrait décrire la scène d’un enfant qui se brosse les dents le soir avant d’aller dormir d’une telle façon que cela en deviendrait épique. Et c’est peut-être ce qui sauve cette histoire.

Si différente des illustres Légende et Waylander, l’on sent une certaine retenue dans ce livre. Une vraie analyse des sentiments et des complexités sociales entre personnes d’un même groupe et aux idéaux bien différents. Les deux-tiers du livre sont basés sur de la marche à pied à travers le pays et de réflexions philosophiques. Le reste est de la l’action vite expédiée et un peu de mysticisme avec une histoire légèrement abracadabrante de passé et de présent qui s’entremêlent pour vaincre la menace des Rois vampyrs. L’on a cette impression que Gemmell écrit une relation amicale (qu’il aurait lui-même vécu dans la vraie vie) avec une personne dont il n’adhérait pas au comportement, c’est un sentiment étrange qui accompagne ce livre, beaucoup d’amertume s’en dégage. Un résultat mitigé en ce qui me concerne.

« – Il doit bien rigoler à présent, déclara-t-il.
– Qui ?
– Dieu, le diable, celui qui a écouté la prière de Jarek Mace. J’ai l’impression d’être un pion dans le jeu de quelqu’un d’autre. Quoi que je fasse, la légende grandit. Si je pissais en public, quelqu’un jurerait qu’un arbre en or a poussé dans la flaque. »

Les personnages

Vous l’aurez peut-être compris, les deux protagonistes sont le conteur Owen Odell, jeune homme issu de la noblesse, un peu frêle et naïf sur la bonté du monde alors que Jarek Mace, le « héros » de l’histoire, est un bel homme, fort et doué d’une conscience que l’on peut identifier comme douteuse. Le mixe des deux est très intéressant, chacun apprenant à l’autre à évoluer au fil de leurs rapports et de leurs aventures. Le changement qui s’opère chez Owen est de loin le plus subtil et le plus intéressant vu que l’on vit l’histoire à travers ses souvenirs et sa personne.

Les personnages secondaires que sont le bossu Wulf et le « géant » Piercollo sont si importants qu’ils pourraient être des personnages principaux également. L’importance de Wulf dans cette histoire n’est pas à démontrer et propose un registre psychologique qui apporte beaucoup à l’aventure.

D’autres personnages, importants à leur façon et à des moments bien précis de l’histoire, vont venir agrémenter le tout pour proposer une fresque compacte et cohérente. L’on notera Ilka la prostituée muette, Azrek le comte de Ziracu, la Soeur Astiana, Brackban ou encore Corlan et Raul Raubert. Beaucoup de personnages comme dans la plupart des histoires de Gemmell et où personne n’est superflu, chacun joue son rôle.

 » – Tu es un imbécile heureux, Owen. Que veux-tu donc que je fasse ? Lever une armée de paysans et de Highlanders pour prendre le pouvoir aux Angostins ? 
– Et pourquoi pas ?
– Tu me vois devenir roi, peut-être ? Le roi Jarek ?
– Peu importe ce que je vois. L’important, c’est la façon dont eux te voient.
Son sourire s’évanouit.
– Je suis un homme, Owen. Tu as entendu ce qu’a dit le sorcier. Même moi, j’accepte le nom de meurtrier. Le viol, en revanche… ce n’est pas vrai. Je n’ai jamais eu besoin de forcer une femme. Mais j’ai volé, j’ai trompé, j’ai menti et j’ai triché. Je l’avoue sans honte. Notre pays est fait pour des hommes forts, et les hommes forts prendront toujours ce qu’ils veulent aux faibles. Je sais ce que je suis, et je ne suis pas ton Étoile du Matin. »

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Ce que j’ai aimé

  • Un one-shot hors de la saga du Cycle Drenaï mais qui pourtant reprend quelques codes et suggère un éventuel lien avec la fameuse saga.
  • L’écriture de Gemmell, efficace comme toujours.
  • Les personnages. Une marque de fabrique de l’ami Gemmell. Même ceux qui semblent faibles et naïfs arrivent à élever leur niveau pour démontrer que la force n’est pas que dans les muscles et font preuve d’un courage héroïque alors que rien ne les prédestine à surmonter les épreuves qu’ils vont endurer. Les relations entre les différents protagonistes est également un point fort du roman.

Ce que j’aurai aimé, ce qui m’a dérangé

  • Toutes les histoires ne se ressemblent pas et on peut apprécier cela. Mais connaissant deux des plus grandes œuvres de l’auteur, j’ai trouvé ce livre généralement moins bon que les deux autres que j’ai pu lire.
  • Combats vite expédiés, les Rois vampyrs ne sont que trop peu présents et la bataille contre les Agostins ne dure que 2 pages à tout casser. Une sentiment que tout ceci a été bâclé m’a envahit. Comme si l’auteur en avait un peu assez de décrire les atrocités de la guerre et des combats.
  • Quelques bonnes idées, quelques moments d’actions, mais le tout assez vite effacé par ce besoin de mettre en avant l’évolution des personnages suite aux événements qu’ils traversent.
  • Le héros Jarek. Owen n’arrête pas de parler comme quoi c’est un héros mais que l’image que l’on s’en fait est mauvaise. Mais je trouve que Gemmell aurait pu aller beaucoup plus loin dans ce « héros malgré lui » et lui attribuer des sentiments beaucoup plus sombres, plus crus. Il a clairement des défauts et des idées discutables, mais cela reste relativement lisse.

Point neutre

  • L’on a une histoire dans l’histoire, où passé et présent se mélangent pour finalement comprendre que tout ceci n’est finalement qu’une boucle qui ne cessera jamais de tourner, et l’histoire sans cesse amenée à se répéter. L’idée est intéressante sur papier et les pistes, bien que certaines prévisibles, sont amenées subtilement. Certains crieront peut-être au génie. Pour ma part je n’ai pas été très fan de l’idée.
  • Comme je le remarque depuis quelques livres, l’idée d’une carte n’aurait pas été de trop pour visualiser ce périple. Elle n’est certes pas nécessaire, mais cela aurait été un bonus appréciable.

Conclusion

Beaucoup apprécieront cette histoire qui propose ici une aventure très humaine et très prononcée sur le questionnement du bien et du mal. Une fresque Fantasy différente de ce que nous a habitué le maître Gemmell avec son mondialement connu Cycle Drenaï. Un monde toujours aussi cruel, un bandit qui devient le héros de tout un peuple, un barde un peu naïf qui découvre la réalité du monde, des monstres et des vampyrs. La recette a de quoi plaire. Et pourtant. Lorsque l’on connaît les grandes œuvres de l’auteur, on ne peut qu’être envahit par un sentiment de trop peu, notamment en ce qui concerne l’action, le héros bandit et mauvais garçon est un peu trop lisse et un sentiment d’amertume qui se dégage du livre à la fermeture. Cependant, l’histoire se lit vite, la fluidité et la force des personnages se chargent du reste.

Note

7,5/10

Si vous avez apprécié cette critique (ou pas), n’hésitez pas à commenter. Si vous l’avez déjà lu ou si vous avez des questions spécifiques au récit, laissez une trace de votre passage 🙂

D’autres avis d’experts, c’est par ici –>

11 réflexions au sujet de « Avis Lecture : L’Étoile du matin (David Gemmell) »

  1. Je l’ai lu il y a très longtemps et je suis globalement d’accord avec toi. J’ai bien aimé, mais je l’ai trouvé un cran en-dessous de Waylander ou de Druss. Pour moi, il est aussi plus complexe que les autres, étant donné le concept de base (la boucle temporelle, comme tu le dis si bien dans ta chronique). Et le point fort reste indéniablement les personnages.

    Mais peut-être étions-nous trop habitués aux héros légendaires de Gemmell pour apprécier totalement L’étoile du matin ? 🙂

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    1. Oui, comme tu le dis, la complexité des personnages est malgré tout un cran au-dessus d’un Druss barbare. Après, je suis vraiment étonné que Gemmell ait à ce point bâclé la bataille finale. Mais oui comme tu dis, quand on lit Légende, Druss et Waylander, on est habitué à un style bien définit et ce livre, bien qu’il ait quelques similitudes, casse un peu les codes établis dans le Cycle Drenaï.
      Merci pour ton retour en tout cas 🙂

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  2. Je suis plutôt sur la même ligne que toi. J’ai lu ce livre il y a un bon moment déjà, et je n’en garde que très peu de souvenirs. Celui d’avoir passé un bon moment, mais rien d’impérissable. Le cycle Drenaï, Waylander m’ont beaucoup plus marquée, ou encore Rigante. Après, la qualité d’écriture est toujours là et la lecture d’un Gemmell reste un plaisir 🙂

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    1. À 100% d’accord avec sur toute la ligne. Après, j’avais démarré Rigante et c’est vrai que les 3-4 premiers chapitres il ne se passait pas grand chose non plus, mais rien à faire, l’écriture de l’auteur est telle qu’on se laisse transporter dans l’imaginaire du récit. Je reprendrai cette lecture dans quelques semaines (mois ?).
      Merci pour ton retour 🙂 Je constate que c’est pour plusieurs autres blogueurs la même sensation en tout cas.

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